Question de transmission, de l’“Émile” à l’apprenant et de la parole à la communication
Comment une œuvre de pure imagination nous informe-t-elle de la continuité et de la rupture dans la tradition éducative occidentale depuis Platon ? Car si l’Émile annonce l’apprenant d’aujourd’hui, la fiction rousseauiste dépasse la réalité contemporaine par la « destination » (Kant) ; il est en effet des conditions pour que le « métier d’homme », essentiel à Jean-Jacques Rousseau, se transforme en « savoir-être » : compétence attendue désormais. Le chemin d’Émile se sépare alors résolument de celui des nouveaux apprenants voyageurs.
De son côté, l’Essai sur l’origine des langues soulève des questions embarrassantes qui, même sondées par la linguistique, restent toujours en suspens. Le langage servirait-il à exprimer nos besoins et nos pensées ? La parole serait-elle un moyen de communication et d’information ? Rousseau ne le pense pas, Saussure non plus ; d’autres, tel Lacan, prétendent même qu’elle a un tout autre prix… et les poètes lui font dire des choses insoupçonnées qu’on reconnaît cependant.
Engagée dans de nouvelles conceptions du langage, pressée de servir la libre circulation des personnes et des biens, la didactique des langues et le Cadre européen commun de références ou CECR ont rompu le fil de la transmission et perdu la mémoire de quelques-uns qui pourtant voyaient loin.
Le retour à J.-J. Rousseau : un détour inutile ou une invitation à méditer l’à venir ?